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Brésil Bien engagée, la croissance se poursuit

Le climat tropical permet plusieurs récoltes par an. Le binôme soja / maïs est fréquent.

La productivité de plusieurs millions d'hectares devrait encore s'accroître.

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En 2004, La France Agricole dédiait un dossier au Brésil, alors qualifié de « géant aux dents longues ». Déjà, nous écrivions dans nos colonnes que le pays avait de grandes ambitions sur le marché agricole mondial, et qu’il bénéficiait d’un « gros potentiel de développement ». Soja, maïs, bioéthanol, sucre, viandes de bovine et porcine, volaille … Aujourd’hui, le Brésil est l’un des poids lourds agricoles à l’échelle mondiale, positionné sur le podium de la production et des exportations pour de nombreuses commodités.  

Celso Moretti, président de l’Embrapa (l’organe de recherche agronomique brésilien), relève l’importance de la « transformation du Cerrado » dans la trajectoire du Brésil. La production de grandes cultures s’est progressivement installée depuis les années 1990 dans ce biome de savanes plus ou moins arborées. Il s’étend sur 206 millions d'hectares (Mha), dont 127 Mha considérés comme cultivables. « Nous l’avons transformé en terres fertiles », explique-t-il. Correcteurs d’acidité et fertilisants ont augmenté le potentiel de ces surfaces, aux sols très profonds et facilement mécanisables.

Travaux sur la génétique

Cette transformation s’est aussi appuyée sur l’adaptation de la génétique des animaux et des cultures à la zone tropicale, plus au nord. « Le soja en est le meilleur exemple, juge Celso Moretti. Nous avons fait la même chose pour le maïs, qui fonctionne bien avec le soja en double récolte. » Ce système de production se développe d'ailleurs fortement. Désormais, le maïs « safrinha », implanté après du soja, représente les trois quarts de la production nationale. Depuis quelques années, le Brésil connaît même jusqu’à trois récoltes par an. Il peut aussi compter depuis peu sur des variétés de blé adaptées au milieu tropical (1).

Par ailleurs, « les producteurs brésiliens sont réceptifs aux biotechnologies, avec des taux d’adoption élevés des variétés génétiquement modifiées », estime Othon Abrahão, de CropLife Brasil. Ainsi, 98% du soja et 95% du maïs cultivés au Brésil sont OGM (résistance aux insectes et/ou tolérance aux herbicides), participant à la hausse de la productivité.

Restauration de pâtures dégradées

Le potentiel agricole du Cerrado n’est pas encore exploité à son maximum. En 2020, 53 Mha y étaient dédiées aux pâtures, soit 27% du territoire ; environ 60 % d’entre elles étaient considérées comme modérément (20,6 Mha) ou sévèrement (9,9 Mha) dégradées. Le Brésil y a identifié une ressource de surface cultivable importante. En effet, le pays incite les éleveurs à les restaurer, en mettant en place des « systèmes intégrés ». Il s’agit généralement d’instaurer une rotation entre des grandes cultures (principalement soja, maïs, canne à sucre et coton) et des prairies semées, plus productives.

En plus d’augmenter les surfaces de grandes cultures, ces systèmes augmentent la productivité des troupeaux laitiers ou allaitants. Ils permettent en effet d’amplifier le chargement (3 à 5 têtes par hectare contre 1 en moyenne au Brésil) et réduisent les coûts de production. Bien que rentables sur le long terme, ils nécessitent des investissements importants. Pour encourager leur mise en place, des avantages incitatifs sont accordés aux exploitations qui s’y intéressent, tels que des prêts à bas taux. Autres freins identifiés par plusieurs acteurs brésiliens : la lenteur du transfert de connaissances vers les producteurs, et le manque d’accompagnement technique.

Le processus est néanmoins en marche : dans l’État du Mato Grosso par exemple, les systèmes combinant cultures et pâtures sont passés de 1,1 Mha en 2013 à 2,6 Mha en 2019. L’objectif du Brésil est d’atteindre 30Mha dans tout le pays d’ici 2030. Il compte notamment sur un meilleur accès aux informations, les producteurs étant de plus en plus connectés.

Dans sa course, le Brésil devra néanmoins relever plusieurs défis, tels que la lutte contre la déforestation par exemple, sa dépendance aux importations d’engrais, ou encore l’adaptation aux changements climatiques (menaces la disponibilité en eau, développement de nouvelles maladies…). « On prépare notre agriculture en travaillant sur des cultures et des animaux plus résistants », assure Celso Moretti. Quoi qu’il en soit, le pays affiche des perspectives de croissances impressionnantes en grandes cultures et en productions animales pour la prochaine décennie. D’autres secteurs pourraient également se renforcer comme l’huile de palme et les bioénergies, ou encore l’aquaculture.

(1) Lire aussi La France Agricole numéro 3975, page 22

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